Qui se soucie des âmes?

« Quand il était en prière, il criait si fort qu’on pouvait l’entendre tout autour. Et il disait dans sa clameur :  Seigneur, ayez pitié de ce peuple ! Que vont devenir les pauvres pécheurs ? » C’est ce que ses contemporains ont retenu comme le trait le plus marquant de la spiritualité de ce saint dont l’Eglise fête cette année le huitième centenaire du rappel à Dieu, dans un silence assourdissant. Qu’y a-t-il en effet de plus anti moderne que la prédication de saint Dominique angoissé jusqu’aux larmes par le salut des âmes dont beaucoup se perdent ?  Qui croit encore aujourd’hui parmi le personnel ecclésiastique comme parmi le bon peuple de Dieu, de culture encore vaguement chrétienne, que la non appartenance visible à l’Eglise catholique et le non respect de ses commandements obère lourdement les possibilités de salut ? « On ira tous au Paradis. Qu’on soit béni qu’on soit maudit » chantait Michel Polnareff en 1977. Les années ont passé et cet état d’esprit a envahi l’Eglise. Toutes les religions et tous les comportements ayant été mis, plus ou moins subrepticement, sur le même plan car confiés à la « miséricorde infinie de Dieu », ne restent plus comme ennemis que ceux qui refusent cet indifférentisme doctrinal et pratique.

Madame Michu s’interroge

La messe traditionnelle est le symbole de cet « ancien monde » ce qui explique certainement l’hostilité renouvelée dont elle est l’objet de la part de ceux qui ont fait le choix de bâtir une nouvelle Eglise affichée ouverte, inclusive et tolérante sur les ruines d’une Eglise prétendument constantinienne, rigide et intolérante. Les rumeurs à propos d’une restriction de la possibilité de célébrer librement la messe traditionnelle, les exclusives contre la Fraternité Saint Pierre à Pontigny et à Dijon laissent l’observateur incrédule. Comment concilier cette exclusive contre ce qui a été la messe de l’Eglise pendant quinze siècles et les discours sur l’accueil de l’autre et l’ouverture à la différence ?  Mme Michu, qui s’est un peu informée, a retenu que son curé ne va plus avoir le droit de dire la messe en latin mais que c’est très bien de bénir les couples homosexuels, comme cela vient de se faire en Allemagne. Si son oncle prêtre lui avait annoncé cela il y a quarante ans, elle ne l’aurait pas cru. Quant à la concélébration de son curé avec l’évêque, madame Michu n’est pas concernée même si elle trouve que ce serait, sans doute plus utile que tous les curés célèbrent chacun une messe dans les églises qui ne voient pas un prêtre de l’année. Une amie a transmis à madame Michu la vidéo d’une manifestation devant l’évêché de Dijon le 26 juin. Elle a vu l’archevêque du lieu, Mgr Minnerath, face à une petite foule qui demandait le maintien d’une certaine Fraternité Saint Pierre à Dijon. Les gens avaient l’air énervé. Cela lui a rappelé les manifestations à l’Intermarché quand le chef de service a interdit que l’on travaille avec un fournisseur dont tout le monde était content, qui était là depuis la création du magasin mais qui n’était pas très porté sur les « évolutions sociétales » : produits halal, visibilité des homos, etc. Madame Michu a bien compris que comme elle n’a pas fait de théologie son avis ne compte pas. Elle se console en se rappelant que Jeanne d’Arc non plus n’avait pas fait de théologie et que c’est elle la sainte et pas les intellos de l’époque. Elle a été émue d’entendre une dame témoigner du fait que dans un lycée catholique on s’était moqué de ses enfants parce qu’ils étaient allés à la messe pour Noël. Cela n’a pas eu l’air de beaucoup émouvoir Mgr Minnerath. Madame Michu n’a pas ce genre de souci : aucun de ses enfants ne va plus à la messe. Les seuls qui vont encore à la messe dans la famille ce sont les enfants de sa cousine Stéphanie. Ils vont à la messe en latin…

Un échec marketing

Depuis son interdiction pratique en 1969 puis sa, relative, réhabilitation en 2007 grâce au motu proprio de Benoît XVI Summorum Pontificum la messe traditionnelle n’a jamais cessé d’être célébrée et d’être missionnaire. Devant la persistance de cette célébration les autorités déclarèrent d’abord que cela ne concernait que des vieux et que donc, biologiquement, ce phénomène était appelé à disparaître. Il n’en fut rien. Au contraire les assemblées se développèrent accueillant un public toujours plus jeune. Les autorités décrétèrent alors qu’il s’agissait d’une mode qui passerait. Là encore il n’en fut rien. L’heure serait, paraît-il, à une nouvelle interdiction ou du moins à une réduction drastique de la liberté de célébration de la messe traditionnelle. Alors que la réforme liturgique a vidé les églises– c’est un fait- et que la liturgie traditionnelle les remplit– c’est un autre fait- la solution serait d’interdire ce qui fonctionne bien afin de venir au secours de ce qui fonctionne mal. A grands frais le Vatican a fait appel à des cabinets prestigieux : KPMG, Mc Kinsey, Ernst § Young pour l’assister dans sa gouvernance et sa gestion. Espérons que ces brillants cerveaux auront eu à cœur d’expliquer que vouloir imposer un produit nouveau mais frelaté, à l’identité incertaine, face à un produit plus ancien mais reconnu et plébiscité par le public était un phantasme de service marketing voué à l’échec.

Enfin, alors que vient d’être annoncée la fermeture du séminaire de Lorraine, quelle est la crédibilité d’une réforme et de structures qui aboutissent à ce triste constat d’un évêque : « Pour un jeune prêtre ordonné, douze sont enterrés ». Plutôt que de relancer la guerre liturgique l’heure ne serait-elle pas, 50 ans après la réforme liturgique et la clôture du concile Vatican II, à un bilan factuel et dépassionné de ces événements plutôt que de jeter l’anathème sur ce qui, bon an mal an, continue à fonctionner pour le salut des âmes et la transmission de la foi ?

                                                                                         Jean-Pierre Maugendre

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9 réponses

  1. « Les fumées de Satan sont entrées dans l’Eglise », avait dit Paul VI. Sans doute avait-il sous-estimé le phénomène qui, à son époque, n’avait pas encore atteint l’ampleur d’aujourd’hui. Les saints papes ont brulé le Talmud parce qu’il contenait des horreurs et des blasphèmes contre Notre Seigneur, le pape hérétique brule le missel saint-Pie V parce qu’il ravive et entretient la vraie foi catholique, la seule qui sauve. Ca ne peut être plus clair sur les véritables intentions de la clique vaticane en place et ses relais dans le monde, et spécialement en France et en Allemagne : ils veulent éradiquer la foi catholique, et non pas seulement la Tradition. Mais ils savent que seule la Tradition est capable de remplir les églises et les séminaires, donc c’est par là qu’il faut attaquer. In fine, c’est donc à notre âme qu’ils s’attaquent, ils s’efforcent d’en ravir un maximum à Dieu pour les offrir à leur maître, Satan.

  2. Bonjour,

    Il ne faut pas se leurrer.

    Que cela nous plaise ou non, nous devrons commencer par renouer, et par inciter à renouer, non seulement avec l’Ancien Testament et le Nouveau Testament, mais aussi avec certains maîtres, dont Platon, Aristote, Saint Augustin, Saint Jean Chrysostome, Saint Anselme, Saint Bernard, Saint Bonaventure et Saint Thomas d’Aquin, car nous devrons commencer par nourrir les âmes, afin et avant de contribuer à les sauver, le Christ étant le seul Sauveur.

    Or, il se trouve que cette approche, inspirée, indirectement, par celle d’auteurs tels qu’Hannah Arendt et Allan Bloom, est le type-même de l’approche dont les clercs qui sont au pouvoir, dans l’Eglise catholique, ne veulent pas entendre parler, puisque, pour eux, la priorité a été, hier, la réconciliation de l’Eglise catholique avec la modernité, et est, aujourd’hui, la subordination de l’Eglise catholique à la postmodernité, dans le domaine des concepts et des valeurs, ou, en d’autres termes, la subordination de l’Eglise catholique à la conception dominante des catégories mentales et à la conception dominante des comportements concrets.

    Tout cela a déjà commencé et va continuer par un rapport de force, au sein même de l’Eglise catholique,

    – entre les catholiques partisans de la priorisation de la fidélité aux références les plus fortifiantes et nourrissantes pour les âmes, qui sont aussi les références les plus mal vues par le monde contemporain, en tant que « présentiste »,

    – et les catholiques partisans de la valorisation, à marche forcée, de la conception actuellement dominante du discernement évangélique, de la miséricorde, de l’inclusion, de l’ouverture sur les périphéries, et de l’unité.

    Bonne journée.

  3. Je trouve la décision de Bergoglio excellente !!!
    Sans le vouloir, il vient de prouver que la messe moderne n’est pas valide ; quid de la fameuse herméneutique de la continuité !?…
    Si la « messe » issue de Vatican II n’est qu’une variante considérée comme aussi valide que d’autres rites dans l’histoire de l’Église, notamment de la messe traditionnelle dite « extraordinaire » (qui par son histoire serait plutôt de l’ordinaire), pourquoi supprimer celle-ci, qui a des siècles d’existence, et non cette nouvelle messe qui n’a qu’une soixantaine d’années ?
    La raison en est très simple : la nouvelle messe n’a aucune valeur liturgique et sacramentelle !
    Bergoglio signifie bien ici qu’il y a deux messes radicalement différentes, donc deux doctrines séparées et par voie de conséquence deux Églises…!
    Pour qui veut objectivement se pencher sur les nouveaux rituels des sacrements, de l’ordination des prêtres et de la consécration des évêques issus de Vatican II, il ne peut que s’apercevoir, au minimum, du doute qu’on peut avoir quant à leur validité, messe comprise, si ce n’est l’assurance que tel est le cas !

    Une autre preuve ?
    La messe traditionnelle qui amène du monde, notamment les jeunes, ouvre aux vocations et remplit les églises, à l’inverse de l’Église issue de Vatican II…
    Quand un pape défend se qui se meurt dans la foi catholique pour anéantir ce qui porte des fruits, sans compter que la messe traditionnelle, à l’inverse de la nouvelle ne comporte RIEN -dans le fond comme sur la forme- qui soit opposé au dogme et à la doctrine de l’Église et selon tous les conciles… d’avant Vatican II, cela laisse aisément à penser qu’il y a un vrai problème de fond dans l’Église !
    Les tradis rattachés à l’Église conciliaire ne peuvent que se mordre les doigts de leur choix et constater la totale hypocrisie et manigance d’une Église qui permet tacitement la bénédiction des homosexuels et explicitement la malédiction des catholiques fidèles des apôtres !
    La conclusion a en tirer est simple…et le message de Fatima, notamment les dernières paroles de Soeur Lucie, ainsi que de La Salette devraient faire réfléchir plus d’un de ces tradis sur la fameuse « Église éclipsée », selon les paroles mêmes de la Vierge Marie !
    Le diable, comme partout en ce moment, se montre à découvert et sans vergogne…pour qui sait voir… selon l’Esprit !

  4. Merci saint Dominique !
    C’est l’amour fraternel,( les larmes pour nos frères pêcheurs, les larmes pour l’humanité refusant d’être sauvée) son message. .. Alors attachons nous à l’Amour ! L’unique Pierre d’Angle : le Christ-Jésus, Seul Sauveur !
    Chacune des étapes de sa Vie ici-bas ( les mystères du Rosaire) sont notre propre Chemin salvateur…et nous avons du travail : du « Oui » à la Volonté du Père jusqu’à l’accueil de l’Esprit-Saint à la Pentecôte et notre envoi « comme des brebis au milieu des loups » !

    (Oui le démon a voulu nous faire croire qu’il n’existait pas mais ses perversités et ignominies sont légions et il est démasqué… notre confiance en Dieu nous fait dire qu’il court à sa perte. )
    Oui nous pleurons avec st Dominique de voir les uns et les autres se perdre et nos larmes sont légitimes parce que en communion avec celles de Jésus. ( même si l’intelligiencia nous conseille d’aller nous faire soigner)

    Le cœur des traditions est l’Amour de Dieu et c’est du cœur que nous sommes appelés à vivre en esprit et en vérité. ( le Pape François tente de nous le faire comprendre depuis des années)
    Hauts les cœurs !

  5. Pas encore relevé des affaires de pedophilie, des scandales financiers, englué dans le chute vertigineuse des vocations, dees diocèses incapables de « produire » plus de 45 ordinations l’an, l’episcopat francais s’arc-boute sur sa rigidité idéologique, en exemplarité non point du Christ, mais des idées de la république souhaite déclarer une nouvelle guerre liturgique ? Et bien il vont être servi !!!

    Dans un premier temps je suggère une grève totale des quêtes et des dons à destination des diocèses. L’ont ne veut plus de nous, qu’ils aient a minima l’honnêteté de ne pas quémander.

    1. N’oublions pas la lettre inadmissible de la CEF, préparatrice, ou plus tôt acte de cette déclaration de guerre, envoyée à une Rome manipulatrice, où nous autres laïcs attachés à l’Usus Antiquior, avons été catalogués, segmentes sur un modèle bien connu contre nos amis Juifs, sur le modèle du regime nazi.

  6. Tout cela est très triste … mais pourquoi les Evêques ne reviennent-ils pas à la messe de Paul VI bien dite, en évacuant d’autorité toutes les formes délétères qui se sont enkystées depuis plus de 50 ans pour en arriver aujourd’hui à des messes de rite ordinaire vidées de tout sacré et pataugeant dans un relativisme mou, avec des prêtres qui inventent des formules, des tenues, des célébrations vides.
    Je n’évoque même plus certains cantiques contenant des formules hérétiques ou tellement mièvres et réductrices que je n’ose plus chanter. Dans ma paroisse, je n’ai même plus le souvenir de la dernière fois où on a récité un « vrai Gloria » et un crédo de Nicée.
    Donc si les Evêques se lamentent d’un regain de la forme extraordinaire, qu’ils balayent devant leur porte et nous débarrassent de toutes les innovations continues et aberrantes (souvent portées par des laïcs ignorants mais impliqués, sans repères ni consignes) qu’ils ont laissé entrer dans la liturgie.

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