Que signifie la « pleine communion » avec l’Eglise ?

On n’a jamais autant parlé, en particulier dans l’Eglise, de communion, voire de « pleine communion ». Il s’agit, généralement, de fustiger, déplorer, condamner, etc. les catholiques, dits traditionalistes, qui en raison de leurs réticences vis à vis des réformes conciliaires, au sens large, se trouvent, par le fait même, en délicatesse avec les autorités hiérarchiques de l’Eglise. Mais qu’est-ce qu’être en communion avec l’Eglise ?

Qu’est-ce que la pleine communion ?

Pie XII enseignait dans l’encyclique Mystici corporis du 29 juin 1943 : « Seuls sont réellement à compter comme membres de l’Église ceux qui ont reçu le baptême de régénération et professent la vraie foi, qui d’autre part ne se sont pas, pour leur malheur, séparés de l’ensemble du Corps, ou n’en ont pas été retranchés pour des fautes très graves par l’autorité légitime ». Et nous lisons dans la constitution dogmatique sur l’Église du Concile Vatican II, Lumen gentium : « Ceux-là sont pleinement incorporés à cette société qu’est l’Église qui, ayant l’esprit du Christ, acceptent intégralement sa structure et tous les moyens de salut qui ont été institués en elle, et, en son organisme visible, sont unis avec le Christ qui la dirige par le Souverain Pontife et les évêques unis par les liens de la profession de foi, des sacrements, du gouvernement ecclésiastique et de la communion ».

 La pleine communion se concrétise donc dans la profession commune de la foi, l’usage des moyens de sanctification que sont les sacrements et la soumission à l’autorité hiérarchique légitime. Tout serait d’une simplicité biblique si malheureusement, en particulier depuis quelques décennies, ne s’était établi, parfois, un hiatus entre la proclamation de la foi et la soumission aux autorités ecclésiastiques. Ainsi pendant plusieurs années « Le nouveau missel des dimanches », diffusé par la Conférence des évêques de France et dont l’usage avait été décrété obligatoire, a enseigné que, à la messe « il s’agit de faire mémoire de l’unique sacrifice déjà accompli » (p 332). Définition parfaitement protestante et donc hétérodoxe de la messe. De même pendant des années les fidèles et les prêtres, en « pleine communion » avec leurs évêques, ont demandé à Dieu de ne pas les soumettre à la tentation puis ont proclamé que le Père et le Fils étaient de « même nature », comme deux vulgaires poireaux selon l’expression du cardinal Daniélou. Tout cela à l’encontre de la foi et de la Tradition de l’Église.

Résister à ces enseignement hétérodoxes, soutenus par la hiérarchie, était-ce rompre la « pleine communion » avec l’Église ? Sans doute pas. A cet égard il est pour le moins étrange que la question de la « pleine communion » avec l’Église, des évêques, des prêtres et des laïcs qui nient l’existence du péché originel, l’Immaculée Conception de la Sainte Vierge ou le caractère sacrificiel et propitiatoire de la messe ne soit jamais posée. Il est également curieux que le signe de « pleine communion » imposé aux prêtres par les tenants de « l’Église conciliaire », selon l’expression du cardinal Benelli, soit la concélébration. Ne s’agit-il pas, en fait, d’un primat de l’apparence sur la réalité, d’une volonté de « faire Église » au détriment de la diversité, effective, des croyances. Apparence d’unité et non unité réelle. Une discussion récente avec un religieux, déjà âgé, OMI (Oblat de Marie Immaculée) m’a fait constater, que ce prêtre considérait que la question de l’ordination d’hommes mariés étant désormais acquise, le prochain combat à mener serait celui de l’ordination des femmes. A ma connaissance personne n’a jamais remis en cause la « pleine communion » avec l’Église de ce brave homme dont il ne fait aucun doute qu’il concélèbre à tout va avec ses confrères, son évêque, etc.

Il faut parfois choisir.

Malheureusement, la dureté des temps oblige, parfois, à choisir entre la préservation de la foi et la soumission aux autorités hiérarchiques. Refuser les actuelles « orientations pastorales » en matière de catéchèse apparaît, ainsi, à de plus en plus de laïcs et de prêtres comme une nécessité vitale pour transmettre la foi. De même est-ce nuire à la pleine communion que d’affirmer publiquement que les appels à voter Emmanuel Macron du « citoyen » Ravel, archevêque de Strasbourg, sont un scandale objectif qui le disqualifient définitivement comme « gardien de la foi » ou même « garant de l’unité » ? Car il n’est de véritable unité que par la communion dans la vérité.

Qu’il soit aussi permis à un laïc, s’inspirant de la lettre de Catherine II à Diderot : « Vous oubliez, Monsieur Diderot, dans tous vos plans de réforme, la différence de nos deux positions : vous, vous ne travaillez que sur le papier qui souffre tout […] tandis que moi, pauvre impératrice, je travaille sur la peau humaine qui est bien autrement irritable et chatouilleuse. » de l’actualiser ainsi : « Vous oubliez, Monseigneur, dans tous vos plans de réforme, la différence de nos deux positions : vous, vous ne travaillez que sur des principes avec des personnes que vous quitterez demain puisque la mode est aux changements de diocèses pour les évêques (…) tandis que nous, pauvres parents, nous travaillons pour nos enfants, envers qui nous avons la responsabilité, devant Dieu, et à jamais, de transmettre la foi ».

Enfin, le leitmotiv lancinant de la « pleine communion » n’est souvent qu’une « arme par destination » afin de disqualifier ceux qui, fermes dans la foi, s’en tiennent, dans la tempête actuelle, à ce qui a toujours et partout été cru et pratiqué dans l’Église, au-delà des récentes initiatives pédagogiques et pastorales, plus ou moins heureuses, dont le moins que l’on puisse en dire est que le résultat probant ne saute pas aux yeux.

                                                                                              Jean-Pierre Maugendre

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4 réponses

  1. Nous sommes des membres de la sainte Église lorsque nous nous nourrissons, en esprit et en vérité du Corps du Christ.
    Dans la Lettre aux Éphésiens : « Nous sommes les membres de son corps, formés de sa chair et de ses os. »
    Saint Iréné aujourd’hui : « Le bois de la vigne, après avoir été couché sur le sol, porte du fruit en son temps ; le grain de blé, tombé en terre, et là dissous, resurgit multiplié par l’Esprit de Dieu qui contient tout. Ensuite, grâce au savoir des hommes, ils servent à leur usage et, en recevant le Verbe de Dieu, ils deviennent l’eucharistie, à savoir le corps et le sang du Christ. »
    Je ne crois pas qu’il s’agisse de loi ou de doctrine, il s’agit de foi, d’adhésion à la foi des apôtres… de Vie Évangélique ( en vue de notre rédemption)
    Paul nous le dit : « Ayez en vous les sentiments du Christ Jésus » dans sa lettre aux Philippiens, ;
    « Tout ce qu’Il vous dira faites-le » nous dit La Vierge Marie (Jean 2,5) « Tendrement posé(e) sur le cœur de Marie… aime l’Église » ; dans Jean (5, 15) Jésus Lui-même nous le dit : « celui qui demeure en Moi … et Moi en lui porte beaucoup de fruits.. car hors de Moi vous ne pouvez rien faire » (c’est une invitation au cœur à cœur avec notre Seigneur) alors : Prions !
    Encore une fois, avec Marie, nous apprenons l’obéissance du cœur ( tous les mystères sont des exemples vivants de la véritable obéissance : celle du cœur), c’est bien à nous de vivre le « Je suis venu non pas pour faire ma volonté, mais pour faire la volonté de Celui qui m’a envoyé » de Jésus dans Jean 4, 34 .
    Il s’agit aussi de pauvreté toujours comme la Vierge Marie car : « la puissance de Dieu se déploie dans la faiblesse » (saint Paul) «  Heureux les cœurs de Pauvres… » (Luc 6, 20)…
    Il s’agit de : « Aime …et dis-le par ta vie.. » comme nous y invite saint Augustin. Il s’agit de nous aimer les uns les autres COMME Jésus nous a aimés (Jean13, 34)
    Alors nous devenons corps du Christ, alors nous sommes en pleine communion avec l’Église… nous sommes en Église.

    Tout cela paraît tellement évident, simpliste de loin et, en s’en approchant, impossible à vivre concrètement et pourtant…

  2. La pleine communion avec la hiérarchie qui est au sein et à la tête de l’institution ecclésiale est devenue, notamment à partir du milieu des années 1960, id est à partir de l’encyclique Ecclesiam suam de Paul VI, en 1964, et à partir du discours à l’ONU de Paul VI, en 1965, une pleine communion avec une véritable idéologie, l’idéologie du dialogue ad extra, particulièrement perceptible dans ces deux documents, et du renouveau ad intra, particulièrement manifeste dans la concrétisation du renouveau liturgique que nous connaissons depuis la mise en oeuvre du NOM, en 1969-1970.

    Tout catholique qui critique les fondements, le contenu et les débouchés de cette idéologie est, à coup sûr, en dehors de la pleine communion avec le pape et avec les évêques, même si, par ailleurs, il respecte saintement, dans sa pensée, dans ses paroles et dans son action, ce que prescrivent la foi catholique, l’espérance en Jésus-Christ, la charité chrétienne et les sacrements de l’Eglise, id est le contenu du Catéchisme de l’Eglise catholique, ou celui du Compendium du Catéchisme de l’Eglise catholique, que le pape Benoît XVI a publié au tout début de son pontificat, en 2005.

    Compte tenu du fait que nous sommes en présence d’une idéologie qui est, vraiment bien plus depuis 2012-2013 que depuis 1962-1963, quasiment « en roue libre », dans le domaine du dialogue ad extra et dans celui du renouveau ad intra (comme on l’a vu en 2019, respectivement avec la déclaration d’Abou Dhabi puis avec le synode sur l’Amazonie), notamment en ce qu’elle n’a plus besoin de prendre appui sur les enseignements du Concile stricto sensu pour continuer a se déployer tout à fait à son aise, la pleine communion d’inspiration « conciliaire conservatrice » va devenir de plus en plus difficile, même si elle se transforme en pleine communion « conciliaire contorsionniste ».

    Et si la dynamique dite « pastorale », c’est-à-dire, dans les faits, adogmatique ad intra et consensualiste ad extra, qui est à l’oeuvre, encore plus depuis le début du pontificat de François que depuis celui du Concile Vatican II, continue à se développer, d’ici peu (et ce « d’ici peu » risque de se concrétiser dès l’année 2022-2023, dans le cadre du processus synodal), nous serons bientôt témoins et victimes de symptômes officiels de ringardisation moderniste ou progressiste, ou de « dépassement évangélique », inclusif, périphériste ad extra et synodaliste ad intra, du contenu du Catéchisme de l’Eglise catholique, qui a été publié, pour la première fois, en 1992, c’est-à-dire il y a trente ans, et non avant 1945 ou avant 1914…

    Enfin, si les chrétiens catholiques étaient bien plus en pleine communion avec les fondamentaux théologaux du christianisme catholique, c’est-à-dire avec la foi, l’espérance, la charité et les sacrements, ils seraient bien plus libres et responsables, face à l’idéologie du dialogue ad extra et du renouveau ad intra évoquée ci-dessus, mais il existe aujourd’hui une grande confusion entre ce que nous devons à Jésus-Christ et à Son Eglise et ce que nous devons à la hiérarchie et à ses lubies, lubies propices à la non résistance face au relativisme et au subjectivisme en religion et en morale, d’où la situation actuelle.

  3. Cher Jean-Pierre. Tu as toujours le mot juste et la tournure de phrase si bien adaptée pour rendre les choses claires, avec un brin d’ironie, qui fait que te lire est toujours un délice pour l’esprit. Merci. Véronique.L

    1. Merci chère Véronique de ton indulgence.
      J’ai le plaisir de croiser Xavier de temps en temps.
      En union de prières.
      Bien amicalement.
      Jean-Pierre

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