Mgr de Moulins-Beaufort et l’immigration : entre fatalisme et lieux communs

L’entretien de Pâques, sur la chaîne KTO, de Mgr Éric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims, a été l’occasion pour le Président de la Conférence des Evêques de France d’aborder la question, sensible, de l’immigration. Les lieux communs se succèdent : « Le phénomène de l’immigration ne va pas s’arrêter (…) à cause des changements climatiques (…) Comment est-ce qu’on accueille, qu’on aide à l’intégration ?  (…) Accueillir de la manière la plus juste, la plus efficace (…) Bâtir une société forte, solide, fraternelle, apaisée, unie (…) Ceux qui se bercent d’illusion sont ceux qui essayent de nous faire croire qu’on peut arrêter ce phénomène, etc. »

Prêcher Jésus-Christ ressuscité ?

On peut d’abord se demander si le jour de Pâques est un moment bien adéquat pour aborder ces questions politiques, particulièrement clivantes.  À la manière de la marquise de Sévigné nous aurions aimé pouvoir écrire : « Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouïe, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue, (…) la plus rare : en ce saint jour de Pâques monseigneur l’archevêque de Reims nous a prêché Jésus-Christ. Rejetant les sollicitations des folliculaires il n’a traité que de Jésus. Jésus-Christ crucifié, mort et ressuscité pour nos péchés. Quelle surprise ! Quel ravissement ! »

De nouveaux dogmes ou de nouvelles prophéties ?

Il est d’abord surprenant d’observer qu’en ces temps de confusion générale et de négation, ou d’estompement, des vérités de la foi les plus élémentaires il reste des vérités qui ne se discutent pas : « Le phénomène de l’immigration ne va pas s’arrêter. » Qu’en sait le bon archevêque de Reims ? Il semble ainsi acquis à un inéluctable sens de l’histoire. L’immigration serait comme le courant de flot : un flux irrésistible contre lequel on ne pourrait rien faire. Or il n’existe pas de sens de l’histoire. « Il n’y a pas de sens de l’Histoire, il n’y a pas de vent de l’Histoire, car ce qui fait l’Histoire, selon notre conception occidentale et chrétienne, qui est vérifiée par tous les faits historiques, c’est la volonté des hommes, c’est l’intelligence des hommes, ce sont leurs passions bonnes ou mauvaises. » Colonel Jean-Marie Bastien-Thiry. En d’autres temps, lors des guerres médiques le bon apôtre eut sans doute prophétisé : « Le flot de l’invasion perse ne va pas s’arrêter. » À la décharge de monseigneur de Reims nous cherchons vainement parmi notre personnel politique les dignes héritiers de Léonidas ou Thémistocle. On serait plutôt dans le registre : les pieds-nickelés font de la politique.

L’Église qui n’est plus dans les domaines de la foi et de la morale « Mater et magistra », mère et maîtresse de vérité, mais simplement « experte en humanité » (Paul VI) nous livre son oracle : « C’est de la faute du réchauffement climatique. » Notons que nous avons échappé au pire, car certains « frères évêques » n’auraient pu s’empêcher, à la suite de Laudato Si, de nous prêcher ici la nécessaire « conversion écologique ». Il n’en reste pas moins que si le réchauffement climatique est un fait il reste à démontrer qu’il s’agisse obligatoirement d’un méfait. Les peuples industrieux ont toujours su relever les défis que leur lançait la nature. Confrontés à une nature hostile – « La moitié de ce pays est en eau ou en terres qui ne peuvent rien produire » (Uztariz) – les Pays-Bas s’imposèrent au XVIIe siècle comme la première puissance économique du monde. Nous voyons, en fait, surgir une version actualisée de la théorie des climats de Montesquieu : plus le climat se réchauffe, plus les conditions de vie deviennent insupportables, plus la misère croît, poussant les populations à l’exil. La réalité est que plus que le climat ce sont les systèmes sociaux, les organisations politiques, les modes de vie et les croyances qui influent sur la prospérité ou la misère des nations.

De nombreuses questions sans réponses

Sans transition Mgr de moulins-Beaufort en arrive à la nécessité impérieuse, à l’impératif catégorique kantien, « d’accueillir » et « d’intégrer ». Beaucoup de questions demeurent en suspens : Existe-t-il des limites aux capacités d’accueil des pays hôtes ? Y a-t-il des conditions à poser aux futurs arrivants ? Que faire de ceux qui ne souhaitent pas s’intégrer ? Comment concilier ces appels à l’accueil universel avec les réticences de nombreux évêques à accueillir des prêtres « étrangers à la culture du diocèse » qu’ils soient français originaires d’autres régions ou… africains ? L’arrivée de migrants issus de civilisations radicalement différentes de la nôtre pose-t-elle des difficultés particulières ? Le désir de « changer de vie » comme l’affirmait Emmanuel Abayisenga, l’incendiaire rwandais de la cathédrale de Nantes et aussi meurtrier du père Olivier Maire, suffit-il à créer un droit à l’immigration ? Existe-t-il un droit à la continuité historique des peuples des pays d’accueil ? « Bâtir une société unie ». Certes ! Mais unie par quoi ? Le partage en commun d’une éventuelle commune prospérité matérielle selon le célèbre adage de Fénelon : « La patrie d’un cochon, se trouve partout où il y a un gland » ?

Des vérités bien oubliées

En d’autres temps, avant un certain Concile, on peut penser que d’autres évêques s’ils avaient jugé utile de traiter de l’immigration le saint jour de Pâques auraient eu à cœur de rappeler plusieurs vérités bien oubliées.                                                                          

D’abord la France n’est pas qu’un pays de cocagne. Elle est, avec la Chine, la plus ancienne nation du monde. Un pays, fruit d’une histoire plus que millénaire, profondément imprégné de l’héritage de ce que Jean-Marie Paupert appelait les mères-patries : « Athènes. Rome. Jérusalem ». Devenir français c’est faire sien cet héritage. Le respect du pays d’accueil est le préalable indispensable à toute vie commune paisible, voire harmonieuse : « À Rome fais comme les Romains ».                                                                                                                            

Les Français d’aujourd’hui n’ont aucune dette vis-à-vis des populations qui les rejoignent maintenant. Ce n’est pas la faute de la France, ni des Français si : « Soixante ans après la décolonisation le PIB par habitant de nos ex-colonies africaines est inférieur à celui qu’il était au moment de leur indépendance. » Bernard Lugan. « Dieu pardonne toujours, l’homme parfois, la nature jamais. » C’est la loi de la vie que les zones prospères de basse pression démographique soient la proie des populations issues des zones pauvres de haute pression démographique.  L’esprit de jouissance, et l’effondrement démographique qui en est la conséquence, l’ayant emporté sur l’esprit de sacrifice, est peut-être venue l’heure du châtiment de Dieu sur un peuple qui l’a depuis trop longtemps rejeté ? « Quand Notre-Seigneur ne règne pas par les bienfaits attachés à sa présence, Il règne néanmoins par les calamités inséparables de son absence. » (Cardinal Pie)

                                                                 Jean-Pierre Maugendre               

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7 réponses

  1. – A l’attention de Monsieur Jean-Pierre Maugendre –

    Vous semblez ignorer ou, en tout cas, ne pas prendre pleinement en compte le fait que presque tous les clercs catholiques qui sont partisans de la « pensée magicienne mondialiste », et qui fonctionnnent, au minimum, à la bénignité, à la complaisance, à la complicité ou à la connivence, face à l’écolo-gauchisme, face à l’égalitarisme interreligieux, face à l’homosexualisme et face à l’immigrationnisme, sont fréquemment des personnes porteuses d’un complexe de supériorité morale, par rapport aux réalités et par rapport aux autres personnes qui acceptent, elles, de voir les choses comme elles sont, ou qui sont contraintes, elles, de le faire, aux contact des origines, des composantes et des conséquences de certaines réalités.

    Face à des prêtres, des évêques, des cardinaux et même des papes (Jean-Paul II, Benoît XVI, François), humanitaristes et sentimentalistes au point d’accepter voire d’effectuer des prises de position doctrinales et des mises en mouvement pastorales proches sinon telles que l’égalitarisme interreligieux et l’immigrationnisme, nous ne pouvons presque rien faire, puisque nous sommes en présence de clercs qui sont persuadés d’être dans le camp du bien, voire de servir la cause du Christ, alors qu’ils ne servent qu’une stratégie de conciliation conformiste entre la position de l’Eglise catholique et celles qui relèvent, respectivement, de ce qui est interreligieusement correct et de ce qui est internationalement correct.

    Quand on considère les ordres de grandeur démographiques qui sont en présence, l’immigrationnisme fait à la fois grimacer et sourire : si l’on considère l’Afrique, accueillir en Europe 10 % de la population qui sera présente sur le continent africain, à partir de l’année 2030 (à raison, par exemple, de combien de personnes par an, pendant combien de décennies ?), sera probablement impossible et tout aussi probablement inutile, compte tenu du dynamisme apparemment non maîtrisable et certainement non raisonnable des personnes et des sociétés africaines.

    Nous autres, occidentaux décadents ou, en tout cas, déclinants, nous n’accueillerons pas et nous n’intégrerons pas de migrants, QUAND NOUS AURONS DISPARU, tout simplement, notamment en raison de l’immigrationnisme. Et ce sont ceux qui auront pris notre place qui se chargeront de refuser d’accueillir et d’intégrer davantage de migrants, et qui n’aurons pas, n’en doutez pas, l’humanitarisme sentimentaliste de certains clercs.

    Benoît YZERN

    1. Oui, il est trop tard pour nous reposer sur nos lauriers…. Oui la France a été acclamée ( comme Jésus aux Rameaux) grâce à ses actions exemplaires d’humanité imprégnée de sentiments Christiques… ce fut le temps du bon sens, de l’entraide, de la prière commune des soutiens des pauvres et des malades … bref, le temps de la confiance en Dieu. Même si c’est inconscient, les fruits de plus d’un millénaire de foi, d’espérance et de charité attirent encore les foules ( c’est pourtant bien en Afrique que le Christ est venu accomplir la Volonté du Père en esprit et en vérité !)… mais la France a cru être arrivée, elle s’est regardée dans le miroir et a oublié son baptême, son Père Divin, sa condition mortelle, et l’action persévérante et christique de ses aïeux…
      La Fille aînée de l’Église n’a pas fini sa mission -même si elle est fatiguée par toutes ces querelles et par ses erreurs- le Christ l’appelle encore aujourd’hui à accueillir chaque étranger comme le Christ. .. et elle le fait à travers les christs que nous devenons.

      L’Etat aura beau faire entrer des millions d’étrangers, les parquer comme des bestiaux, les envoyer semer la panique dans nos villages, les envoyer même nous tuer …. Nous continuons d’aimer, d’espérer et de croire à l’action du Christ pour notre pays action directe par l’Esprit-Saint vers les plus démunis et action à travers les christs que nous devenons.

      Il y a de nombreuses conversions mais ne comptez pas sur l’Etat pour vous en parler …

  2. Excellent article.
    Faut il rappeler que la Bible nous parle constamment d’Israël et des Nations. La Nation a donc un sens particulier pour Dieu ; pourquoi vouloir l’ignorer ? Il est triste que trop de pasteurs de l’Eglise cherchent à améliorer le monde en dehors du Décalogue et de ce qui en découle naturellement.

    1. Il n’y a pas de continuité entre l’histoire ancienne de ces pays et leur situation actuelle (un point commun cependant, l’invasion par les hordes musulmanes qui ont abattu les civilisations antiques, souvent prestigieuses, pour y imposer la leur par les massacres et la terreur – ce qui d’ailleurs pourrait nous advenir si nous ne réagissons pas très rapidement. Passons également sur le fait qu’il n’y a jamais eu d’unité du sous-continent indien avant les interventions occidentales. C’est tout le contraire de la France qui, à travers les soubresauts nombreux de son histoire, a gardé des traits permanents de sa culture imprégnée des héritages de la Grèce, de Rome et de Jérusalem.

  3. En matière d’immigration, les déclarations ineptes sont légions dans le monde catholique, toutes « chapelles » confondues. Je pense, dans le monde traditionaliste, à Alain Escada (surnommé Tintin, en raison de sa ressemblance physique mais aussi de sa nationalité), qui veut mettre un terme à toute immigration, même européenne « parce que c’est le devoir de chacun d’être dans sa patrie ». Alors, qu’attend ce monsieur belge pour rémigrer dans la patrie de Tintin, sa patrie? https://gloria.tv/post/oFungjDrBVTT1RuyJXzdKD18J#10

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